mercredi 30 mars 2011

EXCLUSIF. Wildenstein : l'affaire que l'État veut étouffer

Les juges qui instruisent l'affaire Wildenstein ont interpellé Bercy. Dans une lettre de deux pages datée du 23 novembre, ils évoquent des soupçons de fraude fiscale pesant sur la succession du milliardaire Daniel Wildenstein. Les magistrats dressent la liste des biens non déclarés : une incroyable collection de tableaux, une propriété au Kenya, une autre aux îles Vierges, la galerie d'art qu'ils possèdent à New York... et aussi un mystérieux compte bancaire au Japon.
Dans leur courrier, dont Le Point.fr a eu connaissance, les deux juges Daïeff et Tournaire chargés de l'instruction pour "abus de confiance" et "blanchiment" ouverte en 2010 signalent un manque à gagner pour l'État "d'un montant significatif, le patrimoine évadé dans les trusts apparaissant être d'un montant très significatif".
Secret fiscal
En fait, les juges sont engagés dans une course contre la montre. Comme ils le rappellent dans leur courrier, si l'administration fiscale n'a pas porté plainte avant le 31 décembre, la fraude sera prescrite. Contacté par le Point.fr, Philippe Parini, le directeur général des finances publiques, se retranche derrière le secret fiscal, tout en précisant que "l'administration n'a attendu ni les avocats ni les juges pour s'intéresser à ce dossier complexe". Le dossier est surtout sensible puisque Guy Wildenstein, l'héritier de la dynastie, est un ami de Nicolas Sarkozy et l'un des donateurs de sa campagne présidentielle.
L'inertie de Bercy est d'autant plus troublante qu'un agent du fisc détaché au pôle financier a rédigé une note technique de cinq pages dans laquelle il liste "les éléments susceptibles de caractériser une fraude fiscale". Les juges ne se sont pas contentés de tirer la sonnette d'alarme à Bercy, ils ont aussi dégainé auprès du parquet "une ordonnance de soit-communiqué". En clair, ils ont demandé au procureur d'élargir leur champ d'enquête. Interrogé à ce sujet par le Point.fr, le parquet de Paris répond qu'"il ne peut rien faire sans une plainte préalable de l'administration fiscale".
Face au silence du fisc, les juges Daïeff et Tournaire ont repris la plume en début d'année. Réponse de Bercy : "Le dossier est en cours." "Rien ne le confirme, rétorque Me Jérôme Casey, l'avocat de Liouba Stoupakova, partie civile dans l'affaire. La veuve d'Alec, l'autre fils de Daniel Wildenstein, a porté plainte parce qu'elle s'estime lésée dans la succession. Mais elle ne peut pas intervenir sur le volet fiscal. "En effet, seul l'État est habilité à porter plainte", déplore Me Jérôme Casey.http://www.lepoint.fr/societe/exclusif-wildenstein-l-affaire-que-l-etat-veut-etouffer-30-03-2011-1313013_23.php

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