jeudi 17 février 2011

Bahreïn : la police brise la manifestation dans le sang

Inspirés par les révolutions en Tunisie et en Egypte, des milliers de Bahreïnis, essentiellement issus de la majorité chiite, manifestent depuis lundi pour exiger des réformes politiques et sociales dans ce royaume dirigé par une famille sunnite.


Mercredi soir, des centaines d'entre eux avaient entrepris de camper sur la place de la Perle, à Manama, en espérant la transformer en point de ralliement de la contestation à l'image de ce que les Egyptiens ont fait sur la place Tahrir, au Caire, jusqu'à la chute d'Hosni Moubarak. Mais la police est intervenue en force dans la nuit de mercredi à jeudi. Une intervention qui aurait fait au moins quatre morts, une cinquantaine de blessés et décrite comme particulièrement violente par les protestataires. Des détonations ainsi que les sirènes des ambulances ont été entendues à quelques centaines de mètres de la place, alors qu'un hélicoptère survolait le secteur. Une cinquantaine de véhicules blindés ont pu être aperçus jeudi matin en train de circuler en direction de la place de la Perle. Plus d'une dizaine de chars, des véhicules militaires et des ambulances de l'armée se sont également installés dans le centre de Manama, près de la place.


Désormais, la place dont les protestataires espéraient faire leur lieu de ralliement est vide, et les manifestants accusent. "Ils ont attaqué la place où des centaines de personnes passaient la nuit sous des tentes", a décrit un témoin. "J'étais présent (...) Les hommes s'enfuyaient mais les femmes et les enfants ne pouvaient pas courir aussi vite", a déclaré Ibrahim Mattar, un député du mouvement Al-Wefaq, le principal parti chiite d'opposition. "Quiconque a pris la décision d'attaquer les manifestants avait pour but de tuer", a renchéri le chef de cette formation, Abdoul Jalil Khalil. Pour sa part, le ministère de l'Intérieur a simplement écrit sur Twitter que les forces de sécurité avaient "vidé la place" à Manama et qu'une grande avenue de la capitale était partiellement fermée.


"Le peuple réclame la chute du régime"


Le mouvement Al-Wefaq, qui a suspendu ses activités parlementaires, a réclamé mercredi l'adoption d'une nouvelle Constitution plus démocratique. "Nous ne voulons pas instaurer un Etat religieux. Nous souhaitons une démocratie civile (...) dans laquelle le peuple est à la source du pouvoir, et pour cela, nous avons besoin d'une nouvelle Constitution", a déclaré le secrétaire général du parti, le cheikh Ali Salman, lors d'une conférence de presse.


La principale revendication des manifestants est la démission du Premier ministre, le cheikh Khalifa ben Salman al Khalifa, qui gouverne le pays depuis son indépendance en 1971. Oncle du roi Hamad ben Isa al Khalifa, il est perçu comme le symbole de la richesse de la famille régnante. Les manifestants dénoncent aussi la pauvreté et le chômage. Ils s'inquiètent en outre des avantages accordés à des sunnites étrangers venant s'installer dans le petit royaume (citoyenneté, emplois dans les forces de sécurité, logements) qui tendent à en modifier l'équilibre démographique.


Dans les années 1990, le Bahreïn avait déjà été le théâtre de troubles. L'adoption en 2002 d'une nouvelle Constitution et l'organisation d'élections législatives avaient contribué à ramener le calme mais l'opposition juge désormais ces réformes insuffisantes. La colère des manifestants a été accentuée par la mort de deux d'entre eux lundi et mardi dans des accrochages avec les forces de l'ordre. "Le peuple réclame la chute du régime", ont scandé des manifestants mercredi en se frappant la poitrine, un geste de deuil chez les chiites.


http://lci.tf1.fr/monde/moyen-orient/bahrein-la-police-brise-la-manifestation-dans-le-sang-6280958.html

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