mercredi 3 avril 2013

Aveux de Cahuzac : la presse dénonce une trahison

Au lendemain des aveux de Jérôme Cahuzac, qui a reconnu détenir un compte à l'étranger depuis une vingtaine d'années, la presse française dans son ensemble dénonce le mensonge et s'interroge sur les conséquences de ce qui apparaît déjà comme un séisme politique.

Il ne se trouve aucun éditorialiste, ce mercredi matin, pour trouver des circonstances atténuantes à Jérôme Cahuzac au lendemain de ses aveux - alors que depuis des mois, il réfutait en bloc toutes les accusations de Mediapart. "C'est une ignominie. Avec ses dissimulations, ses mensonges, Jérôme Cahuzac a fait bien plus que salir son honneur" écrit Eric Decouty dans Libération, pour qui "l'existence de son compte en Suisse est la première des fautes" de l'ancien ministre du Budget, qui a jeté "l'opprobre sur son action, discrédité la parole politique et soulevé des doutes quant à l'autorité du chef de l'Etat". La dénonciation est unanime, aussi bien dans les quotidiens d'inspiration de droite que dans les journaux d'inspiration de gauche. Pour Paul-Henri du Limbert du Figaro, "à l'heure où la France s'enfonce chaque jour un peu plus dans la crise, rien n'est plus grave que l'atmosphère de suspicion généralisée que provoquera inévitablement l'affaire Cahuzac". Et dans L'Humanité, Patrick Apel-Muller clame que "le scandale politique est énorme" car "l'homme qui tenait entre ses mains le budget de la France, qui pilotait l'administration fiscale et traquait les fraudeurs était lui-même un malfaiteur, auteur depuis plus de vingt ans d'évasions de capitaux et de dissimulation de ressources".

Une attitude qui se retrouve dans les titres et les éditoriaux de la presse quotidienne régionale. "Dans la stratégie du mensonge éhonté devant micros et caméras, on ne voit guère que Lance Armstrong pour rivaliser avec Jérôme Cahuzac !", ironise Hervé Favre dans La Voix du Nord. "Depuis des mois (...) l'ancien ministre du Budget a multiplié les mensonges avec une constance qui n'avait d'égale que sa morgue à l'encontre de ses accusateurs", affirme Dominique Garraud dans La Charente Libre, ajoutant que cette affaire est "symptomatique de dérives individuelles nourries par un sentiment insupportable d'impunité".

Cahuzac s'est "fourvoyé dans la spirale du mensonge"

Un sentiment partagé par Jacques Camus (La Montagne Centre France) soulignant que "comme d'autres avant lui", Jérôme Cahuzac s'est "fourvoyé dans la spirale du mensonge en espérant une trompeuse impunité". Pour Michel Urvoy de Ouest-France, Jérôme Cahuzac "abîme la Politique avec un grand 'P' ". Dans le Midi Libre, Jean-Michel Servant ose un rapprochement avec l'affaire DSK, jugeant qu'au final, cela concerne "deux mensonges, deux hommes rattrapés par la justice, deux gâchis énormes et une classe politique sonnée, humiliée, trahie".

Plusieurs éditorialistes estiment que ces aveux pourraient avoir des répercussions jusque dans les plus hautes sphères de l'Etat. "Ce rebondissement n'est pas moins dévastateur pour le président de la République qui a accordé sa confiance à un homme brillant, mais fragile", selon Raymond Couraud de l'Alsace, et qui va devoir "subir les conséquences de cette affaire sur son image de marque déjà érodée". Ce "mensonge éhonté" selon Christophe Bonnefoy du Journal de la Haute-Marne, "s'il brise tout net le destin d'un homme, est également une épine supplémentaire dans le pied de François Hollande". Et Bruno Dive dans Sud-Ouest de reconnaître qu'aujourd'hui "les deux têtes de l'exécutif se trouvent bafouées". Pour cet éditorialiste "au plus bas dans les sondages, en proie à une crise économique qu'ils ne savent pas comment affronter, menacés d'une crise sociale, Hollande et Ayrault n'avaient vraiment pas besoin de cette crise morale et politique". Se démarquant par un commentaire plus indulgent, Hervé Chabaud dans L'Union-L'Ardennais estime enfin que la confession de l'ex-ministre n'est pas "simplement celle du pauvre pécheur" mais qu'elle permet "à l'homme de se regarder à nouveau et en conscience devant sa glace" et qu'il a gagné "dans cette épreuve" son "combat intérieur".
 

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