samedi 16 juillet 2011

DSK-Anne Sinclair: C’est elle, le maillon fort

Les rares – et même rarissimes – ­intimes qui ont franchi le seuil de la somptueuse prison dorée, dans le quartier bobo de TriBeCa à Manhattan, où sont « enfermés » Dominique Strauss-Kahn et Anne Sinclair depuis plus d’un mois, ont tous ressenti la même émotion étrange. Partout où leurs regards se portent, on ne voit que des dizaines, des centaines de photos de leur famille. De toutes les tailles, de toutes les couleurs, celles dont le couple blessé, fatigué, a choisi de s’entourer pour tenir le coup dans cette épreuve qui s’éternise. Ils sont tous là, sous leurs yeux, les quatre enfants de Dominique, Vanessa, Marine, Laurin, Camille, avec leurs cinq petits-enfants, Samuel, Mathias, Etienne, Emilie, Lucie. Et puis les deux fils qu’Anne a eus avec Ivan Levaï, David et Elie. Et enfin, trônant au milieu de la tribu rassemblée, la nouvelle petite princesse, Jasmine, le premier bébé de David, la première petite-fille de mamita Anne. Celle qu’elle aurait tant voulu voir naître fin mai à Paris, sauf que l’incroyable imprévu l’a contrainte d’embarquer pour New York. Elle a dû attendre début juin pour venir brièvement serrer dans ses bras et gâter cette poupée. Tellement heureuse d’échapper, même deux jours, à l’enfer de leur maison de TriBeCa.

Calme sans être apaisée

Depuis le 25 mai, le couple le plus espéré de la politique française vit ici, reclus. Certes, dans une maison pour acteurs hollywoodiens, de 632 mètres carrés, louée 50 000 dollars par mois, avec salles de cinéma et de musculation ainsi que d’autres « commodités ». Mais une maison dont ils ne rêvaient pas et où ils tournent aujourd’hui comme des lions en cage. Les filles de Dominique, Camille et Vanessa, sont très présentes. Marc-Olivier, son frère, aussi. Les amis de toujours, Jean et Daniela Frydman, chez lesquels Anne est allée se réfugier dans la nuit « horribilis » du 14 mai, ont pris une chambre d’hôtel pour être à leur côté. Jean-Pierre Elkabbach, le copain et pas le journaliste, qui a été de toutes leurs fêtes, est passé les soutenir. Brigitte Guillemette, la deuxième épouse, est venue. Ils pèsent leurs mots. Ils savent que l’ex-star de TF1 est en colère contre ceux et celles qui profitent de leur silence forcé pour se faire de la pub personnelle, en prétendant qu’ils sont liés au couple, un pur mensonge dont Anne saura se souvenir.
L’atmosphère est quand même devenue un peu plus respirable depuis que la justice américaine a levé l’assignation à résidence de DSK, le 1er juillet. Dans les jours précédant l’audience, les familiers qui les voyaient ou leur téléphonaient avaient le sentiment de vivre, impuissants, au cœur d’une tragédie. D’après eux, Anne était calme, sans être apaisée. Douloureuse, mais toujours combative. Son obsession, la seule, aider son homme à tenir le choc, à se reconstruire. A une amie, elle répétait : « Je suis décidée à faire imposer la vérité. Dominique n’a jamais été violent. Il a toujours détesté les conflits. Quand les enfants étaient petits, il n’osait même pas leur donner une petite tape. La gifle, c’est moi qui la donnais. » A une autre, qui lui demandait où elle puisait cet esprit de sacrifice, cet amour dément, elle répondait : « Ne me parle pas de sacrifice, encore moins de folie. J’ai simplement le souci de la vérité. Je connais mon mari. Ce n’est pas un agresseur. » Unique et mince soulagement pour les témoins de ce couple soudé qui fait face, « elle le porte, le protège, le défend. Elle lui apporte sa conviction qu’il est innocent. Lui s’en nourrit et, grâce à elle, il reprend des forces ».
Anne Sinclair a tout d’une héroïne. On la savait forte. Caparaçonnée. Comme dans l’affaire de la Mnef en 1999, qui a obligé DSK, alors ministre des Finances, à quitter Bercy (il a été blanchi en 2001), ou lors de sa liaison, rendue publique en 2008, avec Piroska Nagy, elle a toujours fait face. Fièrement. Car, comme elle le déclarait à Paris Match en 2000, « le mal qu’on lui fait, on me le fait à moi. Je suis prête à rugir, à griffer pour me battre à ses côtés ». Lorsque la présentatrice durant treize ans de « 7 sur 7 » a retrouvé, le 19 mai, celui qu’elle voyait déjà à l’Elysée, il sortait de quatre jours de prison à Rikers Island. Lui, sur le banc des accusés du tribunal de New York ! Elle croyait halluciner. Son brushing était impeccable, mais ses joues étaient en feu. Et ses beaux yeux bleu myosotis paraissaient rougis. Seulement, elle ne pleurait pas. Jamais en public, même confrontée à l’indicible, à l’inconcevable. Quelques minutes plus tôt, elle était arrivée au bras de Camille, 26 ans, sa belle-fille. La tête haute. Personne ne pouvait imaginer qu’au plus profond d’elle-même elle était foudroyée par la peine. « Avec Camille, on se tenait bras dessus bras dessous pour ne pas flancher. Pour rester debout. Mes ongles, plantés dans le creux de la paume de ma main, me faisaient souffrir, mais il fallait rester digne. » Digne, inflexible, et supporteur admirable de son époux assommé par l’épreuve de la prison puis du bracelet électronique. Las, DSK fixait la « gourmette » qu’on impose aux assassins et répétait : « Je ne veux pas être enfermé dans un pénitencier, trois, cinq ou dix ans, comme à Guantanamo. » Il avait peur !

Les journées sont « monotones », le couple s’ennuie…

Depuis trente-cinq jours et nuits qu’ils sont murés dans leur palais en brique rose, Anne et Dominique s’ennuient. Eux qui, seuls ou ensemble, sillonnaient la planète pour leur plaisir ou son travail à lui parlent et reparlent de la « monotonie des jours, du jeudi qui ressemble au mercredi, qui ressemble au lundi ». Deux seules journées, ils ont cru que l’horizon s’éclaircissait, que DSK allait être blanchi de ses sept chefs d’inculpation. Lorsque, le 30 juin, le procureur Cyrus Vance a écrit aux avocats de Strauss-Kahn pour leur faire part des mensonges de Nafissatou Diallo. Et le vendredi 1er juillet, quand l’ex-détenu de Rykers Island est redevenu libre de ses mouvements, interdit de sortie hors des Etats-Unis, et qu’on a restitué à Anne les 6 millions de dollars de caution et de garantie. Micheline Pelletier, photographe et amie chère d’Anne, témoigne : « Même ce jour-là, Anne est restée prudente. Soulagée mais pas euphorique, jamais sur le ton “allez on va faire la fête”, mais “attendez, on n’est pas sortis”. » Car chacun a compris que pour le procureur humilié, Cyrus Vance, il n’est pas question de perdre la face. Il cherche à reprendre la main. Les avocats de DSK, eux, ne veulent pas céder d’un pouce. Rendez-vous au tribunal le 18 juillet. Le couple, devenu aussi célèbre aux Etats-Unis qu’en France, a confiance dans ses avocats. Ils leur ont dit cent fois, et Anne le répète : « Tout est faux. Le dossier est vide. Un jour, Dominique le dira. »
En attendant que justice américaine, qu’on découvre brutale, passe, il faut meubler le temps. Depuis la médiatique sortie au fameux restaurant avec les Frydman, ils ont fait une seule autre escapade dans un restaurant japonais plus discret et moins cher. On a aperçu Anne au Met avec son inséparable Daniela, toutes deux visiblement en pleine séance de brainstorming, comme si l’une ou l’autre avait envie de vider son sac. Si on les voit si peu, en vérité, c’est qu’ils ne peuvent ni ne veulent sortir. Ni lui ni elle ne peuvent plus supporter la meute des journalistes, des photographes, des curieux qui les guettent et les poursuivent.
Que font-ils de leurs journées si « monotones » ? Pour s’épargner psychologiquement, ils ont abandonné toute lecture de la presse et ont débranché les télévisions. C’est pour eux une question de survie. Faute d’aller respirer dehors, un coach veille à l’oxygénation de leurs muscles. Sinon, chacun vaque à ses ­occupations. Dominique, longtemps concentré uniquement sur son dossier avec ses avocats, s’est remis à la lecture. Jean Frydman lui a offert le best-seller américain, « On China », d’Henry ­Kissinger, qu’il a trouvé formidable. ­Micheline Pelletier ajoute : « Il est aux petits soins pour Anne, car il doit se rendre compte que, pour elle, c’est épouvantable. » Enfin, comme toujours, son premier divertissement demeure ses parties d’échecs sur son iPad. Toujours avec le même partenaire, l’avocat Gilles August. Depuis treize ans qu’ils se connaissent, ils évitent de parler politique, car lui est un chiraquien pur sucre.

Elle détient l'exacte réponse

De son côté, Anne n’est pas en train, comme certains l’ont affirmé, de dresser une liste noire de ceux qui les ont sinon trahis, du moins déçus. Et surtout pas, comme on l’a dit, d’y inscrire Martine Aubry. Anne Hommel, la fidèle communicante du couple, dément : « C’est n’importe quoi. Avec eux, Martine a toujours été formidable et même exemplaire. » Non, elle écrit lentement la vie extraordinaire de son grand-père, Paul Rosenberg, l’un des plus importants marchands de tableaux de la première moitié du XXe siècle, en contrat exclusif avec Picasso, mais aussi découvreur de Renoir, Léger, Toulouse-Lautrec… C’est son héritage, après la mort de sa mère, qui explique la richesse d’Anne. L’une de ses amies l’a conseillée : « Ecoute, ton grand-père n’a pas fait fortune sur des affaires malhonnêtes. Tu dois raconter sa vie. » Son ami Bernard-Henri Lévy, qui l’édite chez Grasset, ne la presse pas : « C’est un livre qui doit sortir de son cœur, alors six mois ou six ans, peu importe. »
Tant que le feuilleton judiciaire n’est pas fini, Anne Sinclair n’a pas envie de la moindre manifestation publique. Une question taraude des millions de personnes : « Comment peut-elle continuer à soutenir et à aimer un homme, certes brillantissime, mais qui l’a tant trompée ? » Seule, elle détient, bien sûr, l’exacte réponse. On peut quand même en avancer deux. Tout d’abord, la fille du résistant Robert Sinclair, celle dont le grand homme s’appelle toujours Pierre Mendès France, cette femme de passion, a dans sa vie deux grandes héroïnes : ­Simone Veil qui, elle aussi, a traversé sans verser une larme autant d’épreuves. Et Simone Signoret, la femme qui a toujours adoré son homme, Yves Montand, malgré ses coups de canif à leur contrat. L’autre explication émane du psychanalyste Charles Melman : « Dans notre culture, on a tendance à confondre amour et désir. Anne Sinclair semble assez bien élevée pour les dissocier. Elle aime son époux. Tout en comprenant qu’il peut avoir des désirs qui ne la concernent pas exclusivement. »
A cette enfant unique, qui en a beaucoup souffert, DSK a offert le plus beau cadeau dont elle rêvait petite, à savoir une tribu qu’elle protège comme une lionne ses lionceaux. Elle le veut et le clame aujourd’hui : « Nous avons vingt ans à vivre, nous allons les vivre ensemble et éloigner le cauchemar main dans la main
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